Les aléas de la géo-linguistique font que les habitant.e.s de l’ « arrière-pays thionvillois » vivent dans l’aire linguistique d’une langue qui est également la langue nationale unique (depuis 1984) du pays le plus riche au monde par tête d’habitant, le Luxembourg/Lëtzebuerg.
80 communes françaises ont en effet cette singularité qui devrait au bas mot être considérée comme une sacrée opportunité : être situées dans les starting-blocks de l’eldorado économique
luxembourgeois. Par les tristes temps qui courent, ce n’est pas rien !
Lesdites 80 communes ont comme «Stammsprooch», langue vernaculaire originelle, le «lëtzebuerger Platt» ou francique luxembourgeois. Et pour faire court : le francique luxembourgeois et la langue luxembourgeoise, c’est kif-kif ! Bien sûr, il y aura toujours quelques énergumènes à trouver le Platt de leur village pur et différent de tous les autres idiomes du monde, mais les faits linguistiques balaient leurs élucubrations : les Français.e.s qui parlent luxembourgeois depuis leur enfance ont un «phrasé» qui est en tout point le même que celui des Luxembourgeois.e.s qui vivent sur les bords de la Moselle, différent rythmiquement du phrasé de la koïné luxembourgeoise de la capitale Lëtzebuerg-Stad, mais lexicalement semblable puisqu’il s’agit de la même langue! Rien d’extraordinaire à tout ça : toutes les langues vivantes sont faites de mélanges, de variations et de brassages, car elles ne vivent et n’évoluent qu’en fonction des interactions humaines. Il y a fort à parier d’ailleurs qu’en France, les gens qui prennent ou ont pris (en France ou au Luxembourg) des cours de luxembourgeois standard sont aujourd’hui plus nombreux que les locuteurs natifs (ceux qui ont appris le «lëtzebuerger Platt» in situ durant leur enfance) ! Dans tous les cas, c’est de la langue luxembourgeoise qu’il s’agit. N’en est-il pas de même avec la langue française ? Le français parlé à Dunkerque n’a pas du tout le même «phrasé» que le français pratiqué à Marseille, mais il ne viendrait à l’idée de personne de refuser de croire que c’est du français dont il est question !
Cela fait des décennies, presque un demi-siècle, que des associations franciques, des chercheurs, des syndicats enseignants, des artistes répètent jusqu’à n’en plus pouvoir que le luxembourgeois est un atout primordial pour cet espace aux marges de la France et que le luxembourgeois devrait être pris en compte. Et qu’ont fait les politiciens, mis à part quelques louables et très rares exceptions à droite comme à gauche? La classe politique mosellane dans son ensemble s’est rangée, le doigt sur la couture du pantalon, derrière la promotion unilatérale de l’allemand. Cela fait cinquante ans que ça dure et le moins qu’on puisse écrire, c’est que ça n’a servi à rien ou à très peu de choses (mais les marées de subventions pour l’allemand ont cependant bien dû profiter à certains !). Le pire, c’est que cette politique du tout-allemand se poursuit au jour d’aujourd’hui et que le Conseil Départemental de la Moselle continue fièrement de pratiquer cette politique linguistique imbécile...